L'« affaire des têtes maories » concerne la requête faite, par le musée national néo-zélandais Te Papa Tongarewa, afin de récupérer l'ensemble des dépouilles māori dispersées de par le monde, en l'espèce les têtes momifiées. En raison du principe d'inaliénabilité de l'art, depuis longtemps consacré dans le domaine public par le droit français (voir l'édit de Moulins) et réaffirmé par la loi du 4 janvier 2002 relative aux musées de France1, seule une commission de déclassement ou une loi peut autoriser en principe un tel transfert. Une telle loi avait permis, en 2002, de restituer à l'Afrique du Sud les restes de Saartjie Baartman, alias la « Vénus hottentote ».
L'affaire concerne donc à la fois un point éthique et historique, lié à l'art, à la bioéthique et au colonialisme, et un débat juridique : ces têtes relèvent-elles du domaine public de l'art, ce qui les rendrait inaliénables à moins d'un déclassement préalable ? Ou faut-il dire que de telles « œuvres », étant des organes humains, relèvent des articles 16 et suivants du Code civil français et, par suite, du principe d'indisponibilité du corps humain, interdisant toute appropriation de celui-ci ? En vertu des lois de bioéthique et du Code civil, elles ne pourraient donc être appropriées, ni même sous la forme spécifique et distincte que constitue le domaine public. Cette solution juridique a été écartée par la jurisprudence.
Ces têtes ne sont plus exposées dans les musées de France, cela depuis 1996 au muséum d'histoire naturelle de Rouen2, 1998 au muséum d'histoire naturelle de La Rochelle3, etc. Une vingtaine de têtes sont détenues au total en France, au Quai Branly à Paris, à Rouen, La Rochelle, Nantes et Lyon 2.
Source: Wikipédia
Article dans Libération du 23/01/2012
Comme convenu, les vingt têtes maories («toï moko») détenues dans les musées français ont officiellement été restituées à leur communauté ce lundi à Paris. La délégation néo-zélandaise conduite par Derek Lardelli, «aîné maori», est venue recueillir les restes sacrés de ses ancêtres, au musée du Quai Branly (1), avant leur rapatriement prochain en Nouvelle-Zélande. Au cours de cette cérémonie, Lardelli a salué ce geste, «peu importe comment vous êtes arrivés dans cette terre étrangère (...) merci au peuple français. Aujourd'hui, les ancêtres vous sourient pour nous avoir permis de vous ramener».
Le musée parisien en possédait sept. En mai 2010, la ville de Rouen avait déjà solennellement restitué une tête de guerrier maori tatouée et momifiée qui avait été donnée à son musée à la fin du XIXe siècle. A ce jour, le musée néo-zélandais, Te Papa et son prédécesseur, le Musée national, ont rapatrié des restes ancestraux de 14 pays pour un total de plus de 190 koiwi tangata (restes ancestraux Maori et Moriori). Il est estimé qu’il en existe encore plus de 500 qui attendent leur retour, la plupart conservés dans des instituts européens.
Les Maoris, comme de nombreuses autres sociétés océaniennes, conservaient religieusement les crânes séchés de leurs ancêtres, coupant également parfois la tête de leurs ennemis prestigieux en guise de trophées. Leur art consommé de la momification et surtout les impressionants tatouages ornant leurs visages avaient suscité un très vif intérêt de la part des explorateurs ayant abordé en Nouvelle-Zélande. Malgré l'interdiction de ce commerce par le gouvernement britannique en 1831, le trafic se poursuivra illégalement bien au-delà de cette date.
Depuis une trentaine d’années, la Nouvelle-Zélande exige le retour sur son sol de ces restes humains. En France, depuis le 4 mai 2010, une loi permet aux têtes de retrouver leur pays d’origine. «Les 20 têtes identifiées en France sont remises à la Nouvelle-Zélande au musée Te Papa, elles ne sont plus désormais des objets de collection mais seront entreposées dans un lieu sacralisé», s’est réjoui à son tour le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand.
Les «toï moko» arriveront au musée Te Papa («notre lieu» en maori) de Wellington le 26 janvier, où une grande cérémonie sera organisée en présence du roi Tuheitia Paki pour célébrer leur retour au pays. Grâce aux archives historiques, l’abondante tradition orale maorie et les experts en tatouages, qui ont chacun leur signification et retracent l’histoire personnelle unique de leur porteur, Te Papa tentera de retrouver la communauté d’origine des ancêtres rapatriés.
(1) La cérémonie devait se tenir à la clôture l'exposition, Maori: leurs trésors ont une âme.
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